
« Tant qu'un être humain n'a pas découvert quelque chose pour lequel il serait prêt à mourir, alors il n'est pas à même de vivre ».
Martin Luther King
DRIFTWOOD LADY
de l'île de Jekyll
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Une femme à la conquête de sa liberté
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L’écoute est centrale dans cette création. Sans cette approche sensorielle, je resterais à l’écart du monde, étranger voire insaisissable. C’est en plongeant au cœur des arbres présents que vous pourriez vous laisser immerger comme moi par j'espère une pluie de sensations, un rayonnement de vos pensées, en méditation, face à un paysage sonore, des images qui se transforment en lignes de mots jusqu’à s’évanouir dans la dernière goutte. Cette oasis créatif constitue un refuge éphémère, mais aussi un terrain fertile propice au développement des idées.
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Notes et citations numérotées de l'histoire narrée :
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I Création
II Sur le rivage se dresse un arbre sans âge, majestueux rescapé d’un millier de saisons. Des entrailles de cet arbre surgît Driftwood Lady, un nouveau feu, ardent et frais...
III D’aplomb, au front de l’océan, l’Arbre de Vie (1) récolte le murmure des vagues, cette dentelle crépitante. Il lui glisse à l’oreille, elle s’incline puis entrevoit des routes se dessinant et caressant ses pieds. Devant ce champ liquide et fertile : l’appel de la Vie...
(1) Ici c’est le sens métaphysique de l’Arbre de Vie qui m’intéresse. Parce que la métaphysique relie le monde physique au monde spirituel, cet Arbre de vie symbolise ici la création d'après la vision artistique d'une unité éphémère du chaos et du cosmos. Il révèle les liens entre l'humain et le non humain et efface toute frontière pouvant exister entre la vie et la mort.
IV Driftwood Lady s’enquiert de ces ossements éloquents, ceux de nos ancêtres, racines dans nos cœurs. Réminiscences de l’Homme, plongeon dans l’ascendance...
V La Dryade (2) de Driftwood Beach (3) joue et danse avec son invincible protecteur. Ce gardien d’anamnèses lui apprend la résistance et l’osmose... dans la magique alchimie des éléments.
(2) Dryades (du mot grec dryas : chêne) : nymphes qui, dans la mythologie grecque, présidaient aux bois et aux forêts et dont elles étaient les gardiennes et l'âme. Elles pouvaient errer en liberté et danser autour des chênes qui leur étaient consacrés. Une dryade ne survivait pas à la mort des arbres dont elle était protectrice. L'union d’Eurydice, la plus connue des dryades, et d’Orphée (34) montre que ces nymphes pouvaient se marier.
(3) Driftwood Beach : localisée au nord de l'île de Jekyll, cette plage de contrastes s'étend sur environ un mille. Nommée également le « cimetière d’arbres » par la présence de bois dérivés, provenant de palmiers et de "live oaks" (chênes “survivants”). De nombreux hommes, femmes et enfants de races et nationalités différentes ont parcouru la plage de Driftwood. Ce lieu m’a fait m’interroger sur le mimétisme biologique entre l’homme et la nature (le vivant), ces arbres en l’occurrence. D'où mon intérêt ravivé pour l'animisme.
Cette plage aux échos surnaturels, dans la rencontre avec toutes ces créatures et êtres, m’a parfois rappelé le Jardin d’Éden décrit dans la Génèse – la source de la vie éternelle. Et...le poème Paradis Perdu de John Milton dont l'action prend place en Enfer, au Paradis et dans le jardin d'Éden en l'occurence.
VI Elle grandit sur la branche et bourgeonne en isthme reliant la terre au ciel.
VII La saison est venue de découvrir ce monde et y laisser mes empreintes. Entendez-vous Zéphyr (4) ? Il souffle ces touffes de secrets ineffables le long de la côte... Écoutez... Entre les bruits réside l’indicible...
(4) Zéphyr (Zéphuros en grec ancien) : personnification du vent de l’Ouest dans la mythologie grecque. C’est un vent doux, frais et léger avec parfois le coeur rageur. Il est le fils d’ Astréos (Éole), le Maître des Vents, et d’Éos (9).
VIII Abracadabra ! (5) « L’Art est l' Arbre de la Vie. La Science est l’Arbre de la Mort. (a) »
(5) La provenance araméenne de la formule me parle davantage que d'autres. Elle est prononcé « Evra Kedebra » par le père de tous leurs dieux, EL le Cananéen, et signifiant : « Je créerai selon mes paroles ».
(a) William Blake, The Laocoon, gravure de 1815 - à voir ici : https://blakearchive.org/copy/laocoon.b?descId=laocoon.b.illbk.01 « L’Art est l' Arbre de la Vie. Dieu est Jésus. La science est l’arbre de la mort. » Dans cette gravure témoignant de son imagination excessive, il dévoile Jésus non comme un théoricien de la morale ou un philosophe prodigieux mais comme l'incarnation même du « poétique », tel un être doué d'une créativité suprême, au-dessus de tout dogme, de toute logique et de toute moralité. Selon W. Blake, Jésus représente le symbole de l'être, du rapport vital, unifié et non dualiste, entre le divin et l'humain.
Cette oeuvre, aux dimensions poétique et mystique, je l’ai créée d’après mes idées et réflexions et avec l’inspiration que Blake me donne par sa vision de Dieu, sa propre mythologie illustrée de ses propres gravures, et de l’énergie créatrice transmise à travers ses écrits.
IX Cette jeune femme contemplait les vagues d'argent, déroulant l'avenir depuis l'horizon de bronze. Elle prenait un moment de répit dans la lumière claire et l’air si apaisant. Peau contre écorce, elle s’assoupissait sans force dans ces lances acérées, ces sabres et épées, les puissants bras d'airain de sa fidèle armée. Dans un songe prémonitoire, elle se voyait s’attaquer à cette mer de travail, cet océan de batailles, et parfois, emprunter des layons de fièvre en hurlantes foulées.
X Ô Soleil ! Ô Lumière ! Astre des astres, Oeil de Zoroastre (6), Hélios (7), regard d’or qui m’honore dans les lueurs de l’aurore.
(6) Zoroastre : « Celui qui est proche de l'exaltation » en avestique, langue indo-iranienne apparue il y a plus de trois mille ans - zaraθ = or et uštra = astre, « astre d’or ». Il est le réformateur religieux qui introduit le monothéisme en Perse vers - 700 av. J.-C. Il insiste sur le dualisme lumières/ténèbres. Le Zoroastrisme, révélé la plus ancienne des religions monothéistes, et peut-être la plus méconnue, est à l’origine du mythe de la Fin du Monde. Le Judéo- Christianisme s’est largement inspiré de cette religion perse.
L’enseignement de Zoroastre, à la fois si ancien et si moderne – qui inspira à Nietzsche son célèbre Ainsi parlait Zarathoustra (1885) – insiste sur l’importance de la prière, de l’humilité, du don de soi et de la bonne humeur, clés essentielles d’une vie spirituelle harmonique.
(7) Hélios : Dans la mythologie grecque, il personnifiait le soleil. Non pas un dieu comme l'était Apollon, dieu de la lumière, mais un Titan, le fils d’Hypéron et de Théia.
À noter que dans la mythologie romaine, Helios porte le nom de « Sol » dont s’est vraisemblablement inspiré
William Blake dans sa propre mythologie afin de créer « Los », père de Rintrah (22) et Théotormon (12).
XI De nouvelles forces la convient en ces célestes contrées. Son âme écoute Ouranos (8). Elle s’apprête à partir en quête des dieux qui habiteront son cœur et forgeront son esprit.
(8) Ouranos personnifie le ciel inférieur et l’esprit démiurgique. À noter que les Grecs imaginaient le ciel comme un dôme de laiton, décoré d'étoiles, dont les bords reposaient sur la limite extérieure du disque plat de la terre. Cette divinité primordiale fut donc engendrée par Gaïa (28).
Nikola Tesla, inventeur remarquable rempli d'amour pour l'humanité dit ceci : « Le don de la force mentale vient de Dieu, Être Divin, et si l'on concentre son esprit sur cette vérité, nous devenons accordés (comme un instrument) avec ce grand pouvoir. »
XII Ce jour-là, ouvre grand tes yeux, lis les cieux, regarde où peu regardent et prépare toi à aller où peu vont... tant que tu peux t’adapter à tout changement, ce que tu entreprendras réussira !
XIII Helios s’accorde une halte pour rejoindre Driftwood Lady. Il se glisse et la prend dans ses bras. La jeune femme se délecte de ses rayons, alors qu’ Éos (9), silencieusement, se dérobe sous le regard jaloux de Nyx (10).
(9) Éos : Titanide et soeur d’Hélios, elle est la Déesse de l’Aurore. Surnommée par Hésiode « la déesse aux doigts de rose et vêtue de safran ».
(10) Nyx : Déesse primordiale de la Nuit. Selon Hésiode, elle et son frère Érèbe (Les Ténèbres) figurent parmi les dieux primordiaux nés du Chaos. (cf. la Théogonie d’Hésiode)
XIV Nyx, née du chaos... son faciès s’illumine dans le halo de Séléné (11) qui l’attend patiemment. Nyx observe la scène des confins du ponant...
(11) Séléné : Déesse de la Pleine Lune , soeur d’ Éos (9) et d'Hélios (8).
XV Hélios la prévient de se méfier de Théotormon (12). Il n’a cultivé que jalousie et convoitise et a fini par perdre sa tête gisant sur ce sable sali par toutes ces gueules infécondes.
(12) Théotormon : frère de Rintrah (22) dans la mythologie blakienne. Il eut une vie confuse remplit de désirs vains et incessants, jaloux et envieux de tout. Il est aussi vu comme un tortionnaire impitoyable.
XVI « Connais-toi toi-même » (b), lentement mais surement... Car tôt ou tard, tu croiseras la route puis le fer avec un de ces maléfiques caractères...
(b) « Gnothi Seauton » (grec ancien) - L'origine socratique de cette formule « Connais-toi toi-même » est cependant contestable, Héraclite ayant affirmé antérieurement : « Il faut s'étudier soi-même et tout apprendre par soi-même. »
XVII Arès (13), cet adversaire, ce fléau ou ce vil amant ? Arès lui déclare rempli de fiel : “ La guerre a lieu sur cette terre que je piétine et cache les Enfers ! La guerre c’est la mer que je bois au combat, c’est l’air dans lequel sifflent les flèches qui feront ma victoire. La guerre... c’est dans les flammes du feu sacré qu’elle est née ! Prométhée (14) a volé la foudre de mon père pour vous sauver Hommes, moi je l’ai dompté pour vous réduire à néant !
(13) Arès : Dieu de la guerre, de nature belliqueuse et impétueuse. Malgré tout, il fait partie des douze divinités Olympiennes. Son père Zeus lui rétorque : « Je te déteste plus qu’aucun des dieux qui vivent sur l’Olympe, car tu ne rêves que discordes, guerres et combats ».
(14) Prométhée : le prévoyant, celui qui réfléchit avant. Fils du Titan Japet et de l’Océanide Clymène qui selon Hésiode aurait dérobé « le feu infatigable » pour l’offrir à la race humaine ce qui déplu fortement à Zeus, unique détenteur du feu provenant du ciel. Prométhée désirait aider les humains en leur transmettant le secret du feu. Par là même, il est l’initiateur du changement des rapports profonds entre les Dieux et l’homme, et devient alors le plus humain des dieux grecs.
XVIII La guerre crée des monstres, tel le terrifiant Deimos (15). Si tu avances, il recule... Résistante tu resteras, femme intègre tu seras, l’esprit juste tu garderas.
(15) Deimos : Fils d’Arès (13). Esprit personnifié de la terreur.
XIX Elle devra aussi lutter contre l’épouvantable Phobos (16) conçu pour nous perdre dans ses lacis, ces ruines de la raison, ces abysses de l’hybris (17). Ces tyrans ralentissent et tuent tout épanouissement...
(16) Phobos : Divinité de la panique, de la déroute et de la peur. Il est le second fils d’Arès.
(17) Hybris (grec ancien) signifiant communément la démesure, propre de l’homme moderne selon son culte du moi (individualisme), son ambition amorale et sans limite (arrogance et orgueil). L’hybris s'incarne dans la victoire de l’intérêt individuel sur le bien commun. Prométhée, en son temps, fut pris de démesure lorsqu’il offrit le feu aux hommes.
XX « Son Destin ou ce qui doit advenir adviendra, si elle le décide. »
Le philosophe Carl Jung m'a inspiré au point de rédiger ce titre ci-dessus lorsqu'il Il écrivait : « je ne suis pas ce qui m'est arrivé, je suis ce que je choisis de devenir. »
XXI Sur les sentiers de l’existence, qui parfois prennent des allures de labyrinthe. Une jeune femme vaillante combat l’Hydre de Lerne (18), un monstre d’orgueil, de colère et de méchanceté.
(18) Hydre de Lerne : Née de Typhon et Echidna. Animal aux têtes multiples de serpent qui semait la terreur dans le marais de Lerne. Héraclès (Hercule) vaincra l’Hydre dans le second de ses douze travaux.
XXII Soudain, DL se retrouve face à sa Chimère (19). Ses griffes plantées dans ce miroir d'eau, prête à bondir tel l’ouragan sommeillant en elle. Serait-ce le présage d’un inexorable naufrage ?
(19) Chimère est une créature malfaisante et la sœur de l’Hydre (18). Ce monstre incarne la force de trois animaux avec sa tête de lion, son corps de chèvre et sa queue de serpent. Le héros corinthien Bellérophon la tua en jetant un bloc de plomb dans sa gueule avec l’aide de Pégase. Plomb qui fondît et brûla les entrailles de Chimère.
XXIII Vision d'un Léviathan (20) : « À présent, le serpent rusé chemine en douce humilité,
Et l'homme juste crie sa rage dans les déserts arides où les lions rôdent. » (c)
(20) Léviathan : « À l’origine, le Léviathan est un monstre de la mythologie phénicienne représentant le chaos primitif, un serpent de mer capable de tout détruire, évoqué, par la suite, de nombreuses fois dans la tradition biblique. Selon Le Livre de Baruch, apocryphe de la Bible, le Léviathan, horrible créature marine, surgit lors du cinquième jour de la Création en même temps que Béhémoth, créature gigantesque régnant sur les terres (...) » Les Grands Mythes (2017), de Lucien Fauvernier.
(c) W.Blake, Le Mariage du Ciel et de l’Enfer (1793), I. L’Argument (extrait).
XXIV Entre ombre et lumière, dans l’accalmie passagère, elle se remémore Eurydice (21) et son sort...
(21) Eurydice : Du grec ancien, Eurudíkê, signifiant « large, vaste, sans borne ». Divinité bienfaisante et protectrice de la Jeunesse personnifiant les forces vives de la Nature. Elle incarne également la Justice sans borne. Originellement, elle est une des trois Dryades unie à la forêt, et aux chênes en particulier. Elle se mariera à Orphée (33). (cf. le mythe d’Eurydice et Orphée)
XXV L’Ombre s’installe en la silhouette d’une vision se noircissant. Elle ignore encore ce qui se cache dans l'obscurité...
XXVI Elle est prise dans le tourbillon de l'incertitude. « Rintrah (22) gronde et fait claquer ses flammes dans l’air alourdi ; affamés, des nuages d’ébènes pèsent sur l’abîme. »(e). Tandis qu'Argès (23), à la neuvième heure, pointe ses glaives griffant l’air brûlant et le firmament étouffant.
(22) Dans la mythologie blakienne, Rintrah incarne la juste colère du prophète », il représente l’esprit rageur de la révolution. Plus tard dans les Visions des Filles d’Albion, Blake le fait devenir un des quatre fils de Los (le soleil), il est l’énergie suprême.
(23) Argès : Cyclope ouranien né de l'union de Gaïa et Ouranos. Cyclope signifie « œil rond », il porte cette brillance - étymologie d'Argès - au milieu du front représentant la luminosité de la foudre qu'il incarne. Il peut être aussi apparenter à l' « œil du ciel » et par analogie à l'œil du soleil.
(e) W.Blake, autre extrait de L’Argument, Le Mariage du Ciel et de l'Enfer.
XXVII Dans l’éclipse irréelle du crépuscule, à l’intérieur d’une minute dissimulée, se dessinait sur le ventre de ce gardien une entrée secrète... son nombril éphémère.
Dans la nuit sans fond ...
XXVIII « Lorsque sa vue veut pénétrer trop loin dans les ténèbres, il advient qu'en imaginant elle s’égare. » (f) D’irrésistibles lueurs écarlates l’attirent, l’attisent, lui sourient et la tentent... En ces sombres échos d’un feu obscur, une bougie brûle, seule et glacée, au fond du puits menant à Hadès (24).
(f) Dante Alighieri, La Divine Comédie, L'Enfer, chant XXXI.
(24) Hadès : Fils de Chronos et de Rhéa et frère de deux autres Olympiens, Zeus (le Ciel) et Poséidon (La mer). Hadès sera destiné à régner sur le royaume sous-terrain des Enfers (pas celui des Chrétiens) dans les entrailles de la Terre avec son épouse Perséphone.
XXIX En faire un passage - Des tombeaux s’esquissent sur les parois du Tartare se lamentant. Son corps jamais assouvi jète son ancre dans le flot de sang qui la voit, qui la sent. En cette rivière tapissée de chairs, elle se métamorphose en arborescence rugissante puis déjoue les spectres lugubres dans ce torrent des larmes nourrissant le Styx (25). Les tambours de Thanatos (26) tonnent dans le giron des Enfers. Ces battements qu’on ne redoute pas jusqu’à ce qu’on sache ce que sont des coups lourds qui s’abattent comme des haches sur le tronc de l’espoir, sur le refrain du destin. Mais la femme juste continue à marcher coûte que coûte pour atteindre cette lumière blanche, paradigme de l’infini, là-bas derrière les falaises du vertige où hommes et femmes vivent en paix ».
(25) Styx : Marais et fleuve des Enfers. Les eaux du Styx se précipitaient en une énorme cascade, au milieu d'un paysage désolé. Selon Hésiode, « l'eau du Styx forme sous terre un ruisseau toujours couvert d'une sombre nuit. Elle coule dans le Tartare. »
(26) Thanatos : Fils de Nyx (10) et personnification de la Mort. Il est fondamentalement l’ennemi des mortels.
XXX " L'œil de Zeus "
De l'infernale urne cette perle s'évade
Elle s'accorde une ultime roulade
En délivrant sa ritournelle déguisée
À cet océan d'oreilles aiguisées
L'eau claire préserve de la soif des insatiables nuits
Le vent n'éteint pas les flammes mais les nourrit
Jadis dans le feu éloquent j'ai vu ce désert de Je
La peur plantée-là avec son regard insidieux
XXXI L'Instant d'Éternité - « Rien ne naît ni ne périt mais des choses déjà existantes se combinent puis se séparent de nouveau. » (g)
(g) Extrait d'une citation d’Anaxagore de Clazomène (-500/-428 av.J-C). Voici sa pensée à ce sujet tirée du Fragment I : « Les Hellènes parlent mal quand ils disent : naître et mourir. Car rien ne naît ni ne périt, mais des choses déjà existantes se combinent, puis se séparent de nouveau. Pour parler juste, il faudrait donc appeler le commencement des choses une composition et leur fin une décomposition ». Anaxagore fut le premier philosophe à s’installer à Athènes. Dans son rapport au petit, il estime qu'il n’y a pas de minimum et qu’il existe toujours plus petit. Il méprisait la sphère politique contrairement à bon nombre de penseurs grecs. C'est ce philosophe qui a dit que la semence de toute chose était contenue dans le vent.
XXXII Renaissance
Perles explosant dans l'ombre muette d'hier
Bulles vives se multipliant en ce rai de lumière
Scintillant derrière leur masque aquatique
Et pétillant au rythme du courant élastique
Beautés immaculées éclatant dans le moussant ruban
Billes subtiles enrobées de cachemire si brûlant
De cette luminescence mammaire jaillit l'avenir d'opale
Né de la première écume échappée du dédale
XXXIII Dans l'écume du nouveau jour, Eosphoros (27) s'émerveille de la renaissance de Driftwood Lady échappée des Enfers. Éclot Aphrodix (28) sur la lande frétillant les larmes joyeuses de Gaïa (29). Cette beauté au teint divin avance à l’instar de ce frisson infini dans ce bouillonnement de renaissance.
(27) Eosphoros est dans la mythologie grecque le porteur de la « lumière de l’aurore », les Romains l’appelaient
L u c i f e r .
Eosphoros représente une face de notre planète Vénus, visible un peu avant l’aurore ; tandis que son frère Hespéros représente la même planète Vénus, visible après le crépuscule. Lorsque les anciens s’aperçurent qu’Eosphoros et Hespéros n’étaient qu’une seule et même planète, Vénus, ils disparurent en perdant toute signification.
(28) Aphrodix : fusion-création du nom d’Aphrodite et du prénom Alix, d’après leur étymologie respective. Aphrodite symbolise dans la mythologie grecque l’amour céleste autant que l’amour physique, la beauté, le plaisir et la procréation. Dans la théogonie, elle est née de l’écume (grec : aphros) après que Gaia est ordonnée à son fils Chronos d’aller couper le sexe de son volage de père Ouranos. Alix proviendrait du grec alexein, repousser ou protéger, et de andros, homme. Mot proche de la guerrière qui signifie « celle qui repousse l'ennemi » ou « celle qui protège les hommes ».
(29) Gaïa : Elle est une des divinités primordiales parmi Chaos (l’origine), Eros (l’Amour), Nyx (la Nuit) cf.(10) et Tartare (les Entrailles de la Terre). Gaïa est la personnification de la Terre dans la Théogonie d'Hésiode (126-154), elle est l'ancêtre maternel des races divines et des monstres.
XXXIV Aphrodix et Cerbère (30)
Le pouvoir de changer les choses est en elle : faire entendre sa voix c’est distiller son essence, celle-la même qui enivre et convainc Cerbère gardien des Enfers.
(30) Cerbère : Gardien du royaume d'Hadès. Souvent décrit comme un chien imposant pourvu de trois têtes. Chacune de ses têtes peut représenter la jeunesse, l'âge adulte et la vieillesse, ou le passé, le présent et l’avenir. Cerbère fut enchaîné par Héraclès (Hercule) lors de son dernier et douzième travail.
XXXV La Belle et la Bête
- la Bête (31) s’incline devant la Belle et lui avoue : « Tu es plus blanche que le lait d’Héra (32), plus douce que la poudre de safran, et plus fraiche que l’eau pure dont j’ai tant rêvée. Ton regard a plus d’éclat qu’un diamant et a fait baisser toutes mes armes. »
- Aphrodix se penche et lui souffle : « Observe ce qui est beau et tu deviendras beau à ton tour. »
(31) La Bête : inspiré par le film La Belle et la Bête de Jean Cocteau, lui-même adapté du conte de Mme Leprince de Beaumont. « L’enseignement majeur de ce récit est que le vrai fondement de l’amour réside dans la bonté. En pleine période réaliste, le poète se propose de ré-enchanter le monde à " l’encre de lumière " que sont pour lui les images du cinématographe, et de montrer aux spectateurs que de la laideur peut naître la beauté. L’émerveillement redonne à chacun son âme d’enfant ». Extrait de https://www.bande-a-part.fr/cinema/dossier/ belle-bete-de-jean-cocteau-magazine-de-cinema/
(32) Héra : fille des Titans Cronos et Rhéa, elle était la reine du ciel et de l'Olympe.
XXXVI En se faisant face, en apprenant puis se comprenant, ils sont devenus de véritables amis. L’amitié est le seul canon d’où peut jaillir l’amour !
XXXVII Elle chevauche les plateaux de sel en compagnie de son guide : une intuition infaillible qui la mènera jusqu’aux plages qu’il faut fouler. Accompagnée de ses deux meilleurs alliés : le salut et la confiance en soi.
XXXVIII Son Daïmôn (32) lui rappelle : « Dis, écris, peins, sculptes, joues, danses, chantes ce en quoi tu crois, ce pour quoi tu es faite... Garde la foi et n’abandonne jamais ton rêve ! Jamais ! »
(33) Daïmôn : génie ou intermédiaire entre les dieux et les humains qui n'est lié à aucun culte. Dans mon œuvre, il représente la figure du guide qui met Aphrodix sur la voie de la connaissance de soi.
« Toute culture a sa daïmonologie, c'est-à-dire une théorie et une expérience de puissances supra ou infrapsychiques (esprits, anges, archontes, archanges, génies, démons, démiurges, fravartis, djinns, chérubins, éons, fées...) dont l'apparition peut signifier pour l'être humain une rencontre avec son propre destin : salut, tentation, chute, oracle, conseil, guide, initiation, perte, présage... Ce polymorphisme (capacité à se présenter sous différentes formes) ne signifie pas pour autant un illogisme. Au contraire, une phénoménologie de ces expériences montre qu'il s'agit d'une dimension humaine essentielle. Que les irruptions du daïmonique dans le monde humain se réalisent spontanément ou par une technique métapsychique ; il semble que ces puissances (H. Corbin parle d'« énergies ») se manifestent toujours comme des entités psychiques plus ou moins autonomes. Elles s'accompagnent de tout un ensemble caractéristique de visions, de voix, de traces sémantiques telles que blessures, brûlures, hématomes (ou au contraire d'une insensibilisation comme dans les marches sur le feu), de prémonitions, d'anamnèses, de sorties du corps, de lévitations, etc. » écrit par Alain Delaunay, chercheur au Collège International de Philosophie.
XXXIX Sous l’axe millénaire, Aphrodix goûte à ce fruit gorgé de lumière qui lui enseigne ceci : s’aimer soi-même, c’est aimer le monde !
XL Inspiré par sa nouvelle muse, Orphée (34) s’accorde avec Aphrodix pour qu’elle incarne la corde magique de sa lyre. Cette voix de l’harmonie radieuse lui transmet l' é n e r g i e . Elle s’élève, vibre et jamais ne s’abaissera !
(34) Orphée : Artiste mythique de Thrace prenant aussi l’appellation de citharède. Il fut renommé pour ses mélodies enchanteresses. Egalement fondateur à Athènes de l’Orphisme qui est inhérente à la religion des mystères (...) Apollon lui fait don d’une lyre à sept cordes, fabriquée par Hermès, qu’il transforme en cithare à neuf cordes (dédié aux neuf Muses). Il échouera à ramener sa femme adorée Eurydice du royaume d’Hadès.
XLI « Aucun oiseau ne s’envole trop haut s’il vole de ses propres ailes ». (h)
(h) Proverbe de l’Enfer, Le Mariage du Ciel et de l’Enfer, W.Blake.
XLII « On ne nait pas femme, on le devient ». (j)
Sa grâce réside dans son harmonie avec la nature souveraine. Une femme dont la beauté est sculptée par le temps en ces lieux qu’ils l’ont faits, souvent accueillants, parfois hostiles. En gagnant son indépendance elle pourra savourer sa liberté, ce pouvoir de vivre l’existence qu’elle choisit. Incarner son nom c’est incarner sa vie ! Tel est le message et le précepte de Mademoiselle Liberté.
(j) Écrit par Simone de Beauvoir dans son roman qui l'a fait connaître plus largement : « Le Deuxième Sexe », Tome II, Gallimard, 1949.
« Contrairement à ce qu’on peut penser, cela ne veut pas dire que la féminité ou la masculinité sont le résultat d’une pure construction, qu’on pourrait interchanger. En bonne existentialiste, elle part toujours de l’expérience que le sujet fait de son corps, et en l’occurrence d’un corps irréductiblement féminin. Mais chez les femmes, cette expérience du corps est d’abord faite à travers le regard des autres. Très tôt, elles se doivent d’être jolies, polies, serviables, pour susciter l’admiration, le plaisir et le désir. La femme ainsi reléguée au rang d’objet s’installe dans une irresponsabilité dont elle souffre et jouit à la fois.
La femme naît donc radicalement libre (comme tout être humain), mais elle n’est pas encouragée à exercer cette liberté et finit par endosser l’un des costumes préfabriqués qu’on lui présente, devenant ainsi la femme qu’on attend d’elle ». Tiré de : https://www.philomag.com/philosophes/simone-de-beauvoir
XLIII Driftwood Lady, tu es revenue, Mademoiselle Liberté, tu es devenue. Regardez-la comme une femme qui est et restera libre pour que d’autres le soient et comprennent que c’est un combat permanent.
XLIV À La liberté, sang de la démocratie ! À l’égalité, ciment du vivre ensemble ! À la fraternité, cœur de ce monde ! « Ce monde est dans ma tête, mon corps est dans ce monde ! » (i) Mademoiselle Liberté marche avec le vent et le feu marche avec elle... C’est une femme qui grandit, continue à marcher et à regarder autour d'elle... « Je vais où je deviens et serai ce que demain doit être : aguerri et libre... libre !!! »
(i) Extrait des Essais et Entretiens entre Paul Auster et Gérard de Cortanze, intitulé La Solitude du Labyrinthe, Actes Sud, 1997 : « Le monde est dans ma tête, mon corps est dans le monde (…) Nous habitons nos pensées, la vie qu’on vit est dans la tête, physiquement dans la tête. Mais nous n’inventons pas le monde, nous sommes entourés des choses et nos corps sont trempés dans cette réalité, et c’est cette expérience que je veux communiquer. »
— La fin avant le recommencement :
J'ai décidé de terminer ce premier opus de La Vie De Driftwood Lady avec cette réflexion de Paul Auster que je considère de la façon suivante : j'y vois les tensions créées par nos conditions de vie, celles produites par l'opposition qu'il réside entre la r é a l i t é et le r ê v e ... et pensant à la différence que je vois entre les rêves et les fantasmes. « Nous habitons nos pensées, la vie qu’on vit est dans la tête (...) » écrit Paul Auster. Une façon d'annoncer le second volet de la vie d'une femme se trouvant face à elle-même et aux changements globaux d'un monde dans lequel nous sommes plongés quotidiennement... Driftwood Lady symbolisera ce que la société moderne appelle "l'âge adulte".
"Big City Vision" - le 2ème chapitre - se déroulera à nouveau en Géorgie... mais pas uniquement...
























